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Dans une Mostra de Venise travaillée comme rarement par la montée des extrêmes, sur les écrans comme en dehors, il n’est pas vain de se tourner vers un spécialiste de la question. Vétéran de la guerre du Kippour (1973), architecte de formation, auteur, à 73 ans, d’une œuvre qui brasse documentaires, fictions, théâtre et arts visuels dans un même tourbillon interrogatif, Amos Gitaï présente, hors compétition, Why War, lors du festival qui se termine ce 7 septembre.
Avec cet essai filmique, librement adapté de Pourquoi la guerre ?, l’opuscule de 1933 réunissant les lettres que se sont échangées le physicien Albert Einstein et le psychanalyste Sigmund Freud en 1932, le cinéaste israélien continue de croire aux puissances de l’art et de la dialectique, comme il s’en ouvre au Monde.
Durant mon doctorat d’architecture, à Berkeley, aux Etats-Unis [au milieu des années 1970]. Je l’ai ensuite longtemps laissée de côté, jusqu’à ce que je sois hospitalisé en janvier : je suis tombé sur un exemplaire du livre qui appartenait à ma mère, et j’ai senti le besoin de l’adapter. La sauvagerie du 7 octobre [2023] – les viols, les enlèvements… – a été un grand choc.
Je pense très souvent à Vivian Silver, brûlée vive, chez elle, au kibboutz de Beeri, par le Hamas. Cette femme de 74 ans aidait les enfants gazaouis à être soignés dans des hôpitaux israéliens… Puis la destruction cauchemardesque de Gaza, les dizaines de milliers de victimes, la fausse croyance de Nétanyahou et de son gouvernement fanatique qu’ils peuvent tout obtenir par la force… Tout cela m’a poussé à réaliser Why War. Je n’ai jamais connu une période aussi destructrice, pas même durant la guerre du Kippour. Or, depuis mon premier film, House [1980], je m’efforce de créer des zones de dialogue, au cinéma comme au théâtre.
En 1932, Albert Einstein, à l’initiative de la Société des Nations, s’adresse à Sigmund Freud pour lui poser une question : pourquoi ces animaux intelligents, qu’on appelle les humains, ont-ils besoin de faire la guerre ? Pourquoi ne trouvent-ils pas de solutions sans tuer ? Sa position est presque marxiste, il dénonce l’industrie militaire et le grand capital.
Freud lui répond en sondant les tréfonds de l’âme humaine, scindée entre deux pulsions contradictoires : conserver et détruire, Eros et Thanatos… Dans un premier temps, il reste optimiste sur le pouvoir de la culture pour œuvrer contre la guerre. Puis il change d’avis, jusqu’à se dire qu’elle ne peut rien, ou presque.
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